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Adolescent, je faisais du skateboard, ce qui m’amenait à squatter pendant des heures des non-lieux (parking, centres commerciaux, usines abandonnées, etc.), ces lieux de passages qui n’appartiennent à personne. Au delà de la relecture physique de ces espaces, provoquée par une autre manière de me mouvoir en eux, j’étais très sensible à leur poésie : vides quand ils sont pleins, pleins quand ils sont vides. Jamais vraiment peuplés ni vraiment déserts. À la même époque, je commence à glaner des objets dans l’espace urbain pour bricoler, détourner leurs fonctions, en cultivant une sorte de fétichisme pour leur matière, leur forme... Enfin, cette époque coïncide avec le développement de nouvelles formes vidéos (clip MTV, GIF, naissance de youtube, premiers smartphones…) grâce auxquelles j’entretiens mon goût de l’image en mouvement en format court.

Une première partie de ma recherche plastique consiste à réaliser des installations dans des espaces déshumanisés et connotés afin de superposer de nouvelles narrations à leurs histoires préexistantes. Ces installations se composent d’objets récupérés dans l’espace urbain, détournés puis animés grâce à des moteurs, de l’automatisation, des machines à effets, des images en mouvements, des sons... Ils deviennent alors les acteurs de la fiction qui s’installe et, à terme, l’espace aussi.

Ce rapport espace/acteur est connecté à une autre piste de travail que je développe. Celle-ci concerne des espaces « télégéniques » : des espaces bidimensionnels dans l’écran transposés à l’espace d’exposition sous forme d’installation. Des sets de tournage à la temporalité étrange, sans acteurs, où les éléments s’animent. Ces installations forment des scènes qui s’enchainent de façon absconses comme une architecture onirique. Selon sa forme, cet enchainement suggère au visiteur une lecture « télégénique », en usant des mêmes mouvements qu’une caméra (panoramique, travelling, zoom, plan généraux, etc.). Cette série se nomme les Making Of. Elle est en lien avec la vidéo MAISONPOUP qui à un protocole inversé : questionner l’espace à l’intérieur de la vidéo directement.

Proche du rapport espace/acteur, ma recherche se développe également autour de l’analogie corps vivant/architecture. Celle-ci peut prendre la forme d’une maquette traitant de la pénétration du lieu qu’elle représente, d’une machine à tatouer les murs ou encore d’un grillz (prothèse dentaire en métal précieux portée par les acteurs de la scène hip-hop) pour la « bouche » d’un bâtiment, à savoir son porche d’entrée.